Les révélations de la Banque d'Angleterre : un aveu d'impuissance

 

Se référant au bulletin trimestriel de la Banque d'Angleterre (BoE), sorti  4 jours plus tôt, Gérard Foucher, dans Agoravox, a publié le 18 mars 2014 un article intitulé " Scoop : La Banque d’Angleterre démonte les dogmes !".

Ce bulletin, passé quasiment inaperçu, est une bombe lancée par un des leurs dans le milieu très fermé des banquiers centraux et de la profession bancaire. L'étincelle n'a pas encore atteint le détonateur, mais on peut supposer que cela ne saurait tarder et qu'elle devrait faire des dégâts importants dans le microcosme monétaire de la planète entière.

Voici la traduction de Gérard Foucher des extraits qu'il a choisis dans le bulletin précité :

Deux idées fausses sur la création monétaire

La grande majorité de l'argent détenu par le public prend la forme de dépôts bancaires. Mais la question de savoir d'où vient le stock des dépôts bancaires est souvent mal comprise.

Une idée fausse répandue est que les banques agissent simplement comme des intermédiaires, transmettant à des emprunteurs les dépôts que les épargnants leur confient. Dans cette perspective, les dépôts seraient "créés" par les décisions d'épargne des ménages, puis les banques "prêteraient" ces dépôts existants à des emprunteurs, par exemple à des entreprises cherchant à financer des investissements ou à des personnes souhaitant acheter des maisons.

En réalité, lorsque les ménages choisissent d'épargner de l'argent dans leurs comptes bancaires, ce sont autant de dépenses qu'ils ne feront pas au profit d'entreprises qui auraient pu alors recevoir cet argent en paiement de biens ou de services. Les montants déposés en banque par les épargnants sont autant de fonds qui ne seront pas mis en dépôt par les entreprises. L'épargne par elle-même n'augmente pas le total des dépôts bancaires.

En fait, voir les banques simplement comme des intermédiaires ignore le fait que, dans la réalité d'une économie moderne, ce sont les banques commerciales qui créent l'argent des dépôts.

Cet article explique comment les banques ne prêtent pas les dépôts qu'elles reçoivent, mais au contraire, créent des dépôts par l'acte de crédit. Tout l'inverse de la séquence généralement décrite dans les manuels scolaires.

Une autre idée fausse répandue est que la banque centrale détermine la quantité de prêts et de dépôts dans l'économie par le contrôle de la quantité de monnaie de banque centrale - l'approche dite du "multiplicateur monétaire". Dans ce point de vue, les banques centrales mettent en œuvre la politique monétaire en choisissant la quantité de réserves. Et, parce qu'il est supposé exister un rapport constant entre la monnaie de base et la masse monétaire en circulation, ces réserves sont ensuite "multipliées" pour devenir un montant beaucoup plus important de crédits et de dépôts bancaires.

Pour que cette théorie soit valide, il faudrait que le montant des réserves exerce une contrainte sur le montant des crédits, et que la banque centrale puisse déterminer directement le montant des réserves. Cette théorie du multiplicateur monétaire peut être un moyen utile de présenter l'argent et la banque dans un manuel d'économie, mais ce n'est pas une description précise de la façon dont l'argent est créé dans la réalité. En général, plutôt que de contrôler la quantité de réserves, les banques centrales mettent en œuvre aujourd'hui la politique monétaire en fixant le prix de réserve - qui est un taux d'intérêt.

En réalité, les réserves n'exercent aucune contrainte sur les crédits, et la banque centrale ne fixe pas le montant des réserves disponibles. Comme la relation entre les dépôts et les crédits, la relation entre les réserves et les crédits opère généralement dans le sens inverse de celui qui est décrit dans certains manuels d'économie.

Les banques décident d'abord de la quantité de crédit qu'elles vont émettre en fonction des opportunités de prêts rentables qui s'offrent à elles, et qui dépendent surtout du taux d'intérêt fixé par la Banque d'Angleterre. Ce sont ces décisions de création de crédits qui déterminent la quantité de dépôts bancaires qui seront créés par le système bancaire. Le montant des dépôts bancaires influence à son tour le montant de monnaie de base que les banques voudront détenir en réserve (pour couvrir les retraits par le public, faire des paiements à d'autres banques, ou répondre aux exigences réglementaires de liquidité). Ces réserves sont alors, en temps normal, fournies sur demande par la Banque d'Angleterre.

Voici à présent quelques commentaires édifiants de Gérard Foucher :

… Le multiplicateur monétaire n'existe pas. Les autorités monétaires n'ont aucun pouvoir pour décider de la quantité de monnaie dont l'économie a besoin en imposant une quelconque quantité de réserves aux banques commerciales privées. Le processus fonctionne en réalité dans le sens inverse : les banques créent d'abord du crédit ex nihilo, et les réserves s'ajustent après. Les banques centrales ne peuvent même pas stimuler l'économie en relançant le crédit aux entreprises en créant de la monnaie de base, car ces opérations d'assouplissement quantitatif ne sont que de la création de réserves, et ces réserves ne peuvent pas être transmises à l'économie réelle.

Quoi qu'il en soit, nous devons féliciter la Banque Centrale d’Angleterre pour son courage et son honnêteté. Pour la première fois dans le monde, la vérité est faite sur le fonctionnement réel du système monétaire.

Nous ne connaissons pas les raisons qui ont incité la BoE a étaler au grand jour des mécanismes connus de longue date dans le milieu très fermé des banquiers centraux, mais jalousement conservés "top secret" pour entretenir le tabou monétaire. Choix politique d'une institution pressentant le danger de l'explosion prochaine d'un système complètement vérolé et à bout de souffle ?

En ce qui nous concerne, nous ne pouvons que nous réjouir de voir que les recherches sur la monnaie et les idées développées ici depuis plusieurs années sont officiellement reconnues par l'une des plus hautes autorités monétaires.

Le lecteur est prié de se reporter aux deux documents : "Le pouvoir de la Banque centrale sur l'émission monétaire" , et "Le multiplicateur monétaire". Le premier rédigé pour la première fois en janvier 2006 suivi de quelques modifications et mises à jour de graphiques à fin 2009, le second publié en décembre 2009.

Il s'agit en fait d'un terrible aveu d'impuissance de la Banque centrale d'Angleterre qui confirme les conclusions tirées du premier document et reproduites ci-après  :

En conclusion, la banque centrale n’a aucun pouvoir sur l’émission de monnaie par les banques et par voie de conséquence aucun pouvoir sur la stabilité des prix dont elle s'est elle-même investi de la responsabilité suprême !

Je tiens à remercier chaleureusement Gérard Foucher pour avoir diffusé cette information capitale accompagnée de commentaires simples, clairs et à la portée de tous.

le 14 août 2014

 

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